La bigorexie ou quand trop de sport nuit à la santé
Lorsque le sport prend une trop grande place dans notre vie, rien ne va plus. Les personnes atteintes de bigorexie deviennent obsédées par la poursuite d’objectifs physiques, au point d’en négliger vie sociale ou leur vie de famille.
C’est entendu, dans la plupart des cas le sport est bon pour la santé. Mais comme toute pratique, les excès créent une addiction néfaste tant pour la santé mentale que physique. “Tout est calibré en fonction des objectifs à atteindre”, témoigne Grégory, que nous avons interviewé dans sa salle de fitness. Même chose pour Mike. “C’est comme une raison de vivre“, lâche le sportif.
Bixente Lizarazu, vainqueur de la coupe du monde de foot en 1998, avait été l’une des rares personnalités publiques à faire état de son addiction au sport. Si l’ancien sportif affirme “préférer être accro à ça qu’à autre chose“, la bigorexie n’en reste pas moins une maladie reconnue par l’Organisation mondiale de la santé. Elle peut conduire à l’isolement social, voire dans le pire des cas, à la consommation de produits dopants.
Le docteur Alain Ducardonnet, consultant santé pour BFMTV, fait le point sur cette maladie.
> A partir de quand le sport devient addictif?
“Ça touche à la fois les pros et les amateurs. Pour les amateurs on dit en gros, au-delà de 10, 12 heures par semaine. Là, ça prend beaucoup de place dans la vie. C’est là le tournant, quand la vie n’est plus ce qu’elle devrait être et que tout est axé sur le sport. On organise son agenda, on organise sa vie autour de la pratique du sport. Et c’est ça qui fait que la vie quotidienne, la vie familiale, est amputée.
Il y a un risque de se couper du monde, car on est enfermé, comme pour les addictions aux jeux vidéo, puisqu’on parle bien d’addiction, reconnue comme telle par l’OMS. A partir du moment où on se ferme aux autres pour réaliser sa pratique sportive, là il y a un risque d’addiction et de dépendance.
> Existe-t-il un profil particulier des personnes atteintes de bigorexie?
Ce sont souvent de gens qui ne sont pas bien dans leur peau soit sur un plan professionnel, soit sur un plan personnel et vont avoir cette espèce de transfert vers l’activité physique et sportive, parce que quand elle est très intensive elle va provoquer une sécrétion d’endorphines qui aide lutter contre les douleurs, de la dopamine, de la sérotonine [et activer] les circuits de la récompense. Donc, on va se dire: ‘Quand je fais du sport j’ai du bien-être, je me sens bien. Donc je vais en faire encore plus comme ça je me sentirai encore mieux.’ C’est là que le cercle vicieux commence.
> Est-ce qu’en général la bigorexie est une addiction qui en remplace une autre?
Elle peut en remplacer une autre. C’est-à-dire qu’en effet, on peut fumer, boire de l’alcool, consommer du cannabis, toutes ces choses-là sont très liées au profil de la personne qui va ‘se donner à fond’ pour ainsi substituer [cette pratique] à quelque chose qui ne va pas bien dans sa vie.
> Cette bigorexie se soigne-t-elle et comment?
Bien sûr que ça se soigne. Ça se soigne à partir du moment où le besoin est supérieur au plaisir. Il faut, comme pour toutes les addictions, soit voir un psychologue, soit voir un psychiatre, soit voir un coach sportif qui va vous rééduquer et vous remettre dans une activité sportive de qualité.”