Grippe : le vaccin serait plus efficace injecté au niveau de la peau que dans le muscle

Grippe : le vaccin serait plus efficace injecté au niveau de la peau que dans le muscle

 

 

J-Claude Meignan / Photononstop / AFP


https://www.sciencesetavenir.fr/sante/grippe-et-si-le-vaccin-devait-etre-injecte-en-cutane_132830

 

L’injection au niveau cutané permettrait au vaccin contre la grippe d’activer des défenses immunitaires supplémentaires à celles de la voie intramusculaire classique, d’après une nouvelle étude. 

La saison 2018-2019 de la grippe a causé 9.200 décès en France

Le vaccin de la grippe pourrait avoir une meilleure efficacité s’il était injecté par voie cutanée, ce qui permettrait de surcroit d’évaluer en amont de l’épidémie, d’après de nouveaux travaux de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) publiés dans le Journal of Clinical Investigation.

VIRUS MORTEL. La saison 2018-2019 de la grippe a causé 9.200 décès en France, pour la plupart des personnes âgées, d’après Santé Publique France.

Le vaccin contre la grippe n’est efficace que dans 20 à 40% des cas

La formule des vaccins contre la grippe varie chaque année en fonction de la probabilité de rencontrer telle ou telle souche du virus. Une donnée évaluée par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) 5 ou 6 mois avant la saison, soit le temps de la production du vaccin. Résultat, le vaccin ne cible pas toujours l’intégralité des souches circulantes et en conséquence son efficacité n’atteint jamais 100% et culmine plutôt dans les 40%. Comme la plupart des vaccins, il est administré en intramusculaire (injection directement dans le muscle) : et si un autre mode d’injection permettait d’en améliorer l’efficacité ?

L’injection par voie cutanée active d’autres défenses immunitaires

C’est la réflexion qu’a eue Behazine Combadière, directrice de recherche à l’Inserm, dont l’équipe travaille depuis des années sur l’impact des voies d’administration de vaccin sur la qualité des réponses immunitaires. Le principe est simple : les composantes du système immunitaire que le vaccin va rencontrer et activer pour protéger son hôte ne sont pas les mêmes selon le lieu de l’injection. Ainsi, une injection intramusculaire va plutôt permettre de produire des anticorps contre le virus, c’est-à-dire des grosses molécules qui, en reconnaissant et se fixant sur leur cible, vont permettre sa destruction par des cellules immunitaires.

Mais d’autres modes d’injection existent, notamment les voies intradermique (injection entre l’épiderme – couche externe de la peau – et le derme juste en dessous) et transcutanée (injection au niveau des follicules pileux, qui est une petite poche d’épiderme). Car au niveau de la peau se trouvent des cellules immunitaires différentes de celles que l’on rencontre dans le muscle. Appelées cellules dendritiques de la peau, ce sont des sortes de postes avancés de nos défenses, qui ont la capacité d’aller activer d’autres cellules immunitaires, appelées “cytotoxiques”. Ces dernières sont capables à la fois d’éliminer les cellules infectées, mais aussi de sécréter des molécules inhibant la réplication du virus (mécanisme qui lui permet de se répandre).

La voie intradermique permettrait de combiner les deux voies de réponse immunitaire

Dans l’étude, l’équipe administre le vaccin en intradermique, en transcutané ou en intramusculaire (la voie classique) chez 60 personnes âgées de 18 à 45 ans. Résultat, les injections par voies cutanées induisent bien chez certains sujets l’activation des cellules cytotoxiques. De plus, l’injection intradermique, un peu plus profonde que la transdermique, activait à la fois les anticorps (comme l’intramusculaire) et les cellules cytotoxiques (comme le transdermique).

Ce résultat plaide en faveur de la considération de cette voie d’injection du vaccin dans la mesure où elle déclenche une réaction immunitaire supplémentaire à celle obtenue dans le cadre d’une vaccination classique. Ces réponses cytotoxiques seraient notamment protectrices chez les personnes âgées après vaccination anti-grippale“, explique Béhazine Combadière dans un communiqué. De plus, le vaccin par voie intradermique “nécessite une dose de vaccin inférieure” et, chez les animaux, “suscite des réponses immunitaires plus fortes” que sa version intramusculaire classique, appuient les chercheurs.

Des marqueurs pour prédire l’efficacité du vaccin

Encore mieux : en faisant une prise de sang aux sujets de l’étude le lendemain de la vaccination, les chercheurs se sont rendus compte qu’ils pouvaient détecter la réponse induite par les vaccins sans attendre les 3 semaines nécessaires son efficacité (le temps de la mobilisation totale du système immunitaire). Leurs résultats montrent 2 signatures selon que le sujet répond en activant sa réponse par anticorps, ou par cellules cytotoxiques. Même si d’autres études sont nécessaires pour valider cette découverte, les chercheurs s’attendent à ce que ces signatures soient prédictives de l’efficacité individuelle du vaccin 3 semaines après l’injection.