À la découverte d’un phénomène méconnu des randonneurs débutants, le « mal aigu des montagnes »
Dans un précédent article, nous vous décrivions les adaptations physiologiques, musculaires, hématologiques liées au stress hypoxique, rencontrées notamment lors d’expéditions en haute montagne. Au cours de ces expéditions, la pression barométrique baisse, et l’organisme assimile moins bien l’oxygène. C’est pour ces raisons que l’on a davantage de mal à respirer et que nos muscles sont plus rapidement fatigués. Lorsque ce stress est trop fort, il arrive de connaître le fameux « mal aigu des montagnes » (MAM). Robin Pla, consultant au centre sportif d’Olympe Santé, explique ce phénomène méconnu du grand public et les mesures nécessaires pour l’éviter ou au moins le prévenir.
Le MAM, c’est quoi ?
C’est un syndrome de non acclimatation à l’altitude qui touche environ une personne sur trois, lors de randonnées en montagne, généralement à partir d’environ 3000 mètres d’altitude. Il se caractérise par l’apparition de nausées, de vertiges, d’insomnie et d’un sentiment de fatigue générale. Il est souvent bénin mais peut être vital chez certains sujets (oedèmes cérébraux ou pulmonaires).
Les stratégies d’acclimatation
En réalité, il convient de parler davantage d’amélioration de la tolérance à l’hypoxie plutôt que d’une acclimatation. Effectivement, l’acclimatation ne se fera réellement que lors de l’arrivée en altitude (au-delà de 2000 m). Rien ne remplacera l’effet naturel des conditions environnementales. Mais il est possible de s’habituer à l’hypoxie en s’exposant régulièrement à une baisse du niveau d’oxygène dans l’organisme, notamment par l’usage de chambre hypoxique (comme cela est possible au centre Olympe Santé).
Conseils généraux
Avant de réaliser tout ou une partie d’un entrainement en hypoxie, il faut rappeler que certains principes fondamentaux doivent être respectés afin de minimiser le risque de survenue du MAM. D’abord, il est préférable de réaliser une ascension progressive (environ 400 mètres d’altitude) pour que le corps puisse s’adapter progressivement au manque d’oxygène. Plus on grimpe, plus on manque d’oxygène. D’ailleurs, lorsque le MAM survient, il est souvent préférable de redescendre un peu plus bas, afin de mieux récupérer (et surtout mieux dormir). De plus, il est évident que l’expérience en montagne compte. Plus vous êtes habitué à connaître ce stress, plus votre organisme sera capable de « reconnaître » que vous êtes en haute montagne et que vous arriverez à mieux gérer les contraintes environnementales.
Enfin, il est aussi évident qu’une bonne condition physique permet de faciliter l’ascension. C’est pourquoi il est utile de s’entraîner régulièrement pour arriver en bonne forme le Jour J. Toutefois, le MAM est très individuel et dépend davantage de facteurs génétiques, intrinsèques, plutôt que du niveau d’entrainement. Pour ces différentes raisons, il est donc intéressant d’adopter une stratégie d’acclimatation à l’hypoxie, en amont du départ en montagne.
Méthode numéro 1 : passage en force (non conseillée)
Cette méthode serait de partir en haute montagne, sans le moindre entraînement. Elle est possible mais peu envisageable. La personne connaît les risques en ne prenant pas compte des conseils mentionnés ci-dessus. Dans tous les cas, il semble indispensable de réaliser un entretien médical avec un professionnel de santé qui connaît l’altitude. Un bilan sanguin pourrait également être utile pour estimer le risque de réponses négatives au niveau physiologique, et notamment la complémentation en fer, souvent nécessaire pour une exposition en altitude (le fer aide à fixer l’hémoglobine et donc à mieux transporter l’oxygène).
Méthode numéro 2 : s’acclimater un peu (le strict minimum)
La deuxième méthode consiste à s’exposer au moins une fois au stress hypoxique. Elle ne permettra pas de bénéficier d’effets physiologiques car une exposition plus longue serait nécessaire. Mais elle facilite la prise de conscience de la gêne respiratoire, des éventuels maux de tête, et de la difficulté à produire un effort. Les chambres hypoxiques permettent de simuler des altitudes atteignant parfois 8 000 m.
Bien que l’on ne conseille pas de s’exposer à de telles altitudes lors de votre première ascension, il est largement envisageable de passer 30 minutes à 4 000 ou 5 000 mètres dans ce type d’équipement. En situation passive ou sur un effort à basse intensité, le sportif pourra bien évaluer les effets de l’hypoxie sur son organisme. Un test MAM est d’ailleurs conseillé, afin d’évaluer le risque d’apparition de MAM en situation réelle, en collectant plusieurs paramètres physiologiques. La ventilation, la saturation en oxygène au niveau artériel et la fréquence cardiaque sont des indicateurs qui permettent de prédire le risque de MAM en haute altitude.
Méthode numéro 3 : s’acclimater suffisamment (le plus raisonnable)
La troisième solution est celle que nous préconisons. Évidemment, si vous avez la possibilité de vous entraîner en chambre hypoxique, cette stratégie est bien la plus efficace. De récentes études ont d’ailleurs mis en évidence que la performance en altitude, était améliorée après une exposition quotidienne en hypoxie. Ces travaux de recherche permettent de vous donner quelques conseils pour bien calibrer votre entraînement :
– Réaliser des séances en hypoxie de manière rapprochée. Les effets physiologiques ne s’observent que lors d’une exposition chronique à l’hypoxie.
– Au moins cinq séances sont souhaitables, mais une dizaine s’avérerait plus judicieuse.
– Effectuer ses séances juste avant votre séjour en altitude (jusqu’à la veille du départ), afin de bénéficier des effets physiologiques de votre entrainement.
– Choisissez votre activité physique en fonction de votre mode de déplacement (vélo, tapis de course, etc.).
– Réaliser des séances à basse intensité pour profiter des adaptations cardio-vasculaires liées aux efforts d’endurance.
– La durée des séances doit être au moins égale à 45 minutes pour développer le système aérobie et déclencher la production endogène d’EPO.
– Assurer une progressivité dans vos séances (durée de la session, niveau d’altitude).
– Équipez-vous d’un cardiofréquencemètre et/ou d’un oxymètre pour contrôler vos données physiologiques.
– Entourez-vous d’un coach/spécialiste qui pourra vous conseiller et vous guider dans votre préparation.